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lundi 5 avril 2010

La réautorisation du Ketum et son traitement médiatique


Voici quelques temps, je vois passer l'information suivante : le Ketum, une crème utilisée par les sportifs, a été réautorisé en urgence par le Conseil d'Etat, et ce serait pour des motifs bassement économiques au mépris de la santé publique. Plusieurs journaux s'en sont fait l'écho.

L'Afssaps a en effet suspendu par décision du 17 décembre 2009 la vente des produits à base de ketoprofène à raison d'un risque sanitaire. Le Conseil d'Etat a annulé en référé cette décision le 26 janvier 2010.

Pourquoi en avons-nous eu vent ? Parce que des médias ont interprété de travers la décision de la juridiction administrative suprême et qu'il a été écrit que le Conseil d'Etat ferait primer des considérations économiques sur celles de santé publique.

Ce qui est vrai c'est que le Conseil d'Etat a partiellement motivé sa décision en invoquant l'impact financier de la décision de l'Afssaps pour le producteur concerné, le ketum constituant son second produit le plus important, de sorte que l'arrêt de sa commercialisation compromettait la viabilité de l'entreprise.

Mais ce que n'importe quel juriste devait remarquer, c'est que la prise en compte de l'impact économique par le Conseil d'Etat n'avait sans doute pas pour fin de trancher le fond mais de décider si la procédure de référé était ouverte.

La procédure de référé, qui permet d'agir très rapidement, ne peut être mise en oeuvre que dans certaines hypothèses, l'hypothèse reine étant celle de l'urgence. Et l'argumentaire économique n'avait donc pour fin la plus probable que d'ouvrir la voie du référé.

C'est cette interprétation que la doctrine - voire une simple mais sérieuse lecture de la décision - confirme cf Gazette du palais, 10 mars 2010, p. 8.

Une fois de plus on regrettera le traitement médiatique d'une décision de justice : on comprend de travers et on croit trouver confirmation de ses préjugés, en l'espèce le lieu commun de la soumission de la justice aux lobbies pharmaceutiques, avatar du on nous cache tout on nous dit rien. Ici les médias n'apportent pas la contradiction ni ne médiatisent le pouvoir mais catalysent les préjugés de leurs lecteurs.

Sur le fond, le Conseil d'Etat a réautorisé le produit en raison de la quantité marginale de cas de réactions au produit, ces cas résultant en général d'un emploi ne respectant pas l'ordonnance.

En conclusion, n'oubliez pas d'apprécier par vous-même les informations.